Les défis de la distribution

Beaucoup d’incertitudes planent sur le secteur de la distribution automobile à l’heure où s’ouvre sa « grand’messe », la 98e édition du Brussels Motor Show. Christian Rampelbergh, secrétaire général de GDA, et Bernard Lycke, directeur du CECRA, évoquent pour nous les défis auxquels font face les concessionnaires.

10-01-2020

La première incertitude que pointent nos interlocuteurs, elle est liée à l’absence d’autorités qui soient en mesure de prendre des décisions dans les dossiers les plus sensibles. Si au niveau européen, la nouvelle Commission a enfin pu être instituée au 1er décembre, ce n’est toujours pas le cas du gouvernement fédéral belge, regrette Christian Rampelbergh. « On ne sait toujours pas à quelle sauce on va être mangé au niveau fiscalité », s’inquiète le secrétaire général du Groupement des Distributeurs. « La question des normes WLTP et de la fiscalité attenante reste une épée de Damoclès, un gros point d’interrogation au moment où s’ouvre le Salon de l’Auto. » 

Diesel bashing 

Cette incertitude rejaillit bien entendu sur le comportement des consommateurs qui ne savent plus très bien à quoi ils devront s’attendre dans les prochaines années au moment de choisir leur véhicule. La question n’est d’ailleurs pas seulement fiscale, quand on voit l’acharnement avec lequel les politiques stigmatisent les véhicules à moteur thermique – et en particulier les moteurs diesel.

« Le diesel n’est pas seul à être montré du doigt, souligne Bernard Lycke, directeur général du Conseil Européen du Commerce et de la Réparation Automobiles. Quand on voit à quel point certains responsables se montrent critiques vis-à-vis de la voiture, la question se posera à terme de savoir si la possession même d’un véhicule ne sera pas remise en question. Car même les véhicules électriques sont polluants, il faut tenir compte du bilan global, pas seulement de l’utilisation. »

Tous les véhicules dans le même sac ? « Nous disons au CECRA qu’il faut garder les pieds sur terre, ne pas tout mélanger et tenir compte des évolutions technologiques. Les dernières générations de moteurs diesel sont très propres et n’ont plus rien à voir avec les anciens modèles. Il faut sortir du dogmatisme en la matière : il reste très certainement encore de la place pour le diesel. » 

Infrastructures électriques 

Quant aux véhicules électriques, qui seront représentés en force au salon cette année (comme on le lira par ailleurs dans ce dossier), ils soulèvent encore de nombreuses  questions, estiment nos interlocuteurs. « On met des produits sur la route mais sans disposer de l’infrastructure nécessaire pour compenser leur autonomie limitée ni des décisions politiques susceptibles de les stimuler, regrette Christian Rampelbergh. Produire une voiture électrique et recycler sa batterie coûte plus cher en CO2 qu’un modèle thermique. L’utilisation peut faire la différence, encore faut-il que cette utilisation soit possible ! Les bornes de rechargement sont largement insuffisantes. Et où restent les incitants capables de rendre ces motorisations attractives pour le consommateur final ? »

Sans même parler du dimensionnement des réseaux de production d’électricité, dont rien ne prouve qu’ils seront capables d’absorber une croissance importante du nombre de véhicules électriques en circulation… « Avec toutes ces inconnues, un surcoût important et sans incitants fiscaux ou financiers, il restera difficile pour les concessionnaires de convaincre les consommateurs de franchir le pas. » 

Accès aux données 

La technologie de plus en plus sophistiquée des véhicules automobiles pose d’autres défis aux distributeurs – sans même parler de la formation de leur personnel. L’un des dossiers défendus avec force par le CECRA (soutenu en cela par la plupart des autres acteurs du secteur ainsi que par le Parlement européen) depuis plusieurs années face aux constructeurs est celui de l’accès aux données techniques des véhicules.

A la demande de la Commission européenne, la solution défendue par les marques a fait l’objet d’un test actuellement en cours d’évaluation. Cette solution repose sur l’idée que les données générées par les véhicules seraient stockées sur un serveur géré par les constructeurs qui rendraient accessibles certaines données sur un autre serveur, neutre et géré par une tierce partie, moyennant certaines modalités.

Pour les distributeurs, elle est inacceptable. « Seuls les constructeurs pourraient décider quelles données ils rendent accessibles et selon quelles modalités – notamment financières. Les concessionnaires n’auraient toujours pas d’accès direct aux données, les constructeurs pourraient savoir ce qu’ils en font et les distributeurs devraient en supporter le coût. Nous y sommes clairement opposés », rappelle Bernard Lycke. 

Taille des showrooms 

La technologie embarquée n’est pas la seule à évoluer. Celle qui permet aux consommateurs de s’informer en ligne est aujourd’hui tellement développée qu’ils sont de moins en moins nombreux à visiter les showrooms des concessionnaires, du moins pour s’informer – jusqu’à nouvel ordre, ils s’y rendent encore pour poser l’acte d’achat.

« Cela représente un important défi pour les vendeurs qui sont confrontés à des acheteurs nettement mieux informés qu’auparavant, confirme Bernard Lycke. D’où la nécessité pour nos membres de recruter des vendeurs hyper qualifiés, d’investir dans la digitalisation et le développement de sites internet performants mais aussi dans la gestion des leads et la réactivité. » Il importe par exemple que le consommateur qui a cheminé online puisse achever son parcours sans être bloqué par manque de réponse en dehors des horaires d’ouverture classiques…

A travers ses discussions avec les marques, le CECRA plaide d’ailleurs pour un allègement des standards en termes de surface d’exposition des concessionnaires… à compenser par des investissements dans les outils digitaux, la formation des équipes et une plus grande souplesse dans la gestion des leads. Autrement dit : des showrooms plus petits en échange de réponses mieux adaptées aux besoins des consommateurs qui s’adaptent à l’évolution des technologies digitales. 

Consolidation accélérée 

D’autres éléments poussent à la réduction du nombre et/ou de la taille des showrooms. L’économie tout d’abord, comme dans d’autres secteurs : le prix de l’immobilier dans les villes pèse lourd sur les coûts fixes des concessionnaires qui conservent des grandes surfaces d’exposition. La nécessité de réaliser des économies d’échelle est d’ailleurs l’un des facteurs qui peut expliquer la consolidation qui s’accélère dans le secteur de la distribution depuis quelques années, poussée par l’arrivée en Belgique de grands réseaux internationaux.

Si ce mouvement réduit le nombre d’acteurs, il ne s’accompagne pas encore d’une diminution du nombre de points de vente – mais cela pourrait venir : « On sait que le consommateur est prêt à parcourir une plus longue distance pour aller acheter un véhicule qu’il va conserver pendant plusieurs années, souligne Bernard Lycke. C’est moins vrai pour l’après-vente : l’automobiliste ne veut plus se déplacer trop loin pour changer un pneu, faire l’entretien ou effectuer une réparation sur son véhicule. »

La consolidation peut aussi avoir des conséquences positives. « Moins d’acteurs plus importants peuvent avoir plus de poids dans les discussions avec les constructeurs. De quoi permettre de rééquilibrer une relation dont toutes les enquêtes effectuées notamment par TRAXIO montrent que les concessionnaires se plaignent. » Au bout du compte, le consommateur pourrait en sortir gagnant.

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